« Quand la machine apprend » de Yann Le Cun

Nous vivons une révolution inouïe, inimaginable il y a encore cinquante ans, celle de la machine qui apprend, et qui apprend par elle-même. L'auteur est lauréat du prix Turing, qui équivaut à la médaille Fields (prix Nobel) d'informatique.

Yann Le Cun est l’un des inventeurs de l’apprentissage profond, aboutissement de 20 ans de recherche, le « deep learning », qui caractérise un réseau de neurones artificiels dont l’architecture et le fonctionnement s’inspirent du cerveau.

C’est la naissance d’une nouvelle forme d’intelligence.

Au lieu d’exécuter les ordres d’un programme, la machine peut désormais acquérir par elle-même, par l’expérience, les capacités nécessaires pour accomplir les tâches qui lui sont assignées, y compris celles que l’on croyait réservées à l’humain. Ce « deep learning » est pour l’instant limité : reconnaissance des formes, des voix, des images et des visages, voiture autonome, traduction de centaines de langues, détection des tumeurs dans les images médicales… Dans notre quotidien, on entend souvent parler des algorithmes de Google.

Quels sont les dangers?

L’auteur écarte le danger de « l’algorithmocratie » et estime que les institutions démocratiques devront fixer des garde-fous. Même si l’exemple de la manipulation des données par Cambridge Analytica, entreprise britannique, utilisée par Donald Trump durant sa campagne pour la présidentielle de 2016 aux Etats-Unis, qui a analysé les données de dizaines de millions d’utilisateurs à leur insu, est évoqué.

C’est apparemment l’avenir.

Yann Le Cun est rassurant en évoquant les tâches ingrates qui seront prises en charge par l’intelligence artificielle. De même, l’impact sur la consommation d’énergie des nouvelles machines sera marginal. De  même, la crainte de la destruction d’emplois (40% au maximum) devrait être compensée par les nouveaux métiers.

L’auteur est motivé par la construction d’une théorie du cerveau décrivant comment les 85 milliards de neurones fabriquent un état de conscience capable de jugement comme les humains. Car on sait que l’intelligence n’est pas génétique et que tout se joue dans la relation du cerveau avec son environnement. L’inné est peu de choses comparé aux acquis de l’expérience.

Ce livre qui évoque la démarche intellectuelle d’un inventeur au carrefour de l’informatique et des neurosciences est passionnant, clair et accessible. Il nous fait découvrir un nouveau monde fascinant, qui est déjà le nôtre. L’auteur est professeur à New York University et dirige, en toute liberté, la recherche fondamentale chez Facebook.

« Odile Jacob » – Novembre 2019

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